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La clé perdue
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Penché sur les peuples étranges
l’entomologiste méditait
Les fourmilières grouillantes
songeait-il refusent toute solution
Aux vasières luminescentes on attend
innombrable et placide
de voir le ressac arriver à hauteur
de corniche d’une armoire paysanne
Le merveilleux cadeau reçu - îles dorées
forêts fruitées sable à mémoire de forme
tièdes vents pour vivre nus en un frisson d’élytres
le cadeau rond et vert comme boule de cristal
nul n’y a su lire l’avenir - notre avenir -
hormis peut-être quelques emplumés
débordés par le nombre qui déferla naguère
à travers leurs plaines et dévora le fleuve bistre et ruisselant
d'une fauve beauté qu’inutilement du levant au couchant
protégeait un nuage rouge
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Il n’est pire sourd…
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Au petit Ezra
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Le rougeoiement des cités en ruines
Les spasmes furtifs des cristaux échangés
sous les porches squattés par des ombres
La sourde angoisse des banlieues barbares
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Les stèles tombales sont obliques ou tombées
Certaines en forme de coeur sont enroncées
Les noms et les dates y rouillent sous la crasse
Leurs liens piquants interdisent l’approche
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Celui qui ne veut pas lire tourne son regard
vers l’arête de la falaise ocre d’où la foule
du ciel entre les pins a dessein de se jeter
Mais seuls les nuages ont droit au suicide !
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Une fade odeur de réséda se prélasse dans l’air
Des corbeaux plaident rauquement contre l’avenir
En toge noire ils se prennent pour des oracles - or
musique en tête l’enfant ne veut rien entendre
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Infirmité du poème (2008)
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Comment pourrait-on reprendre la rhapsodie au sein
des si faibles moyens techniques du langage
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Du langage si pauvre en sonorités
que – dong - le moindre dong de cloche
l’effarouche ainsi qu’une colombe – dong -
convaincue que le glas sonne pour elle
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Pourtant le soleil perché dans un pin
allume toutes les fenêtres du village
puis plonge dans le torrent avant d’exhiber
triomphalement à la surface les cabochons du reflet
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Ensuite il laisse filer le courant puis tisse
les arpèges blancs d’une cascade
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Si le poème est sans timbre
- l’univers est musique
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Frère Jacques, dormez-vous ?
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Certains sont faits pour crier les horreurs de ce monde
avec la splendide atrocité d’un Mazin Mamoory
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D’autres se contentent de la solitude des eaux
dont se nourrit l’engoulevent qui frôle l’étang
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Certains ont la force de dire le monde éclaté
la viande humaine explosée sanglante éparpillée
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Moi je suis trop faible pour ne pas vouloir
rabibocher les bribes de reflets du soleil mourant
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et rendre ainsi un peu de la gloire des Origines
à cette terre noire où j’ai mes racines – moi
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frère du pin qu’a courbé le vent du bord de mer
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Lucioles
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Venu d’outre-vision un vent innommé
te secoue comme un sycomore
Des ramures foisonnantes de ton esprit
tombent en spirale des centaines
de poèmes hélicoïdaux
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L’automne vraisemblablement
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Bientôt sèches les feuilles suivront
ramifiées à l’infini par des dentelles d’encre
Sur leur face « hiver » elle formeront
un matelas sur lequel tu pourras
t’endormir confortablement
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Tu sauras, en voyant une à une s’abattre
et s’éteindre sur la prairie de noir velours
les Perséides filles de tes nuits de rêves,
qu’avec la dernière – ton sommeil
aussi minéral que d’une statue pétrifiée
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t’aura délivré pour toujours
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Anticipation
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Tout sera – c’est promis – effacé
La boule de cristal qui ne contient plus
que du passé va éclater, s’éparpiller
comme un vieux pare-brise de voiture
Vouloir réparer ce scintillement brisé
serait aussi vain que de tenter d’ordonner
les bulles moussant à l’arête des vagues
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Le balai du temps – fschi-fschhii – poussera
toutes ces fausses gemmes dans la bouche
d’ombre béant sur on ne sait quel avide
Ailleurs farci de fables et légendes
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Les piles de feuilles brûleront avec
une flamme frétillante comme truite
qui dans le courant soulève un nuage de vase
du même gris que la cendre en train de se
disperser au mistral de tes premiers jours
( Il n’en restera strictement rien du tout
Tout sera – c’est promis – effacé )
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Minute définitive
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Il y eut le mouchoir éclaté
en larmes et sanglots
puis l’adieu depuis le bastingage
et le paquebot
appareilla
(1988)
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Vespertilion
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La chauve-souris au sourire grognon
dans la nuit sonde en silence l’invisible
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Ailes de parchemin nervurées ainsi
que le sont les feuilles de la vigne
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Parente petite mais qui de temps en temps
par jeu peut-être gobe l’une ou l’autre étoile
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Puis retourne sous les tuiles tièdes du jour
tintant du cliquetis d’ongles des colombes
dormir enveloppée d’elle-même - consciente
de ses dents trop frêles pour croquer
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certain énorme insecte radieux nommé Soleil
Opio août 18
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Au faîte des années
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Montagnes que l’air change en bleu limpide
facettes de cristal que le soleil tire des brumes
votre vertige autrefois m’était cher
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Des générations de vagues m’ont plus tard
fait préférer l’azur moussant de la mer Pourtant
l’âge ne guérit pas de la nostalgie des hauteurs
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Pyramide qu’on s’efforce de changer en poème
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Issue sans issue.
À force de ne rien comprendre à ce qu’on appelle « la vie », ni aux êtres humains, fussent-ils les plus proches ( ceux que tu crois aimer le plus ), ni à rien, si ce n’est peut-être au malheur des pierres, tu t’es habitué. Une sorte de brume tiède, haineuse, t’environne et se déplace avec toi. Responsable des malheurs du monde, dans tous leurs détails, tu ne comprends pas la puissance secrète qui, résidant en toi à ton insu, a été capable d’engendrer tant de désastres. Tu ne savais rien de la force des lignées, des filiations par le sang, auxquelles la part féminine de l’humanité est attachée jusqu’au racisme. Il t’a fallu admettre que l’on ne peut, en la société humaine, prétendre à une filiation que ne confirme pas le sacrement de l’ADN. Que la tribu est inamovible. D’erreurs en erreurs, te voici assis sur le rebord de l’abîme final, ce cul-de-sac, toujours ignorant, toujours en porte-à-faux, toujours superflu en un monde qui semble se comprendre lui-même grâce à ton exclusion, exactement comme une huître ressent son intégrité parce qu’elle exclut le grain étranger qu’elle a neutralisé en l’enrobant de nacre. Il ne te reste, grain de sable acéré depuis toujours, ou petit caillou gênant la marche du monde, qu’à faire briller cet orient, ce peu d’irisation dont ton exil follement t’enveloppe, avant la sortie joyeuse, soulageante et définitive.
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Passé la date de péremption
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Rien, rien n’est advenu du fond de la ligne qui ferme ton espace.
Point de ciel offert, ni de fleurs de lumière rayant la nuit.
Lointaines les aspérités du littoral effacent les volutes bleutées du futur.
Tout est inhumain. Tout est froid. Le soleil glane ses rayons dans les flaques laissées par la pluie.
Des torrents d’images crachés par des pans de montagnes s’acheminent chargés de miroirs vers la mer.
Ce qui fut humain, villages, amours, enfants, glaise au creux de la paume, animaux familiers, pie qui nous venait volontiers sur l’épaule, cela, tout cela, dans le torrent du Léthé aujourd’hui n’a plus cours.
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Fantôme de lutin à l’Upiane
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Quelque oiseaux gourmands du bec grappillent dans la vigne étroite du jardin.
Je me souviens d’un pin devant, vers moi penché, qui me murmurait des paroles de vent. Je les croyais, à cause de leur senteur dorée de résine..
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La fauvette et la mésange bleue à l’oeil de pharaonne surveillent la maturation des petites olives. Elles les comptent en échangeant des cris alternatifs. Puis les recomptent. Cela leur prend une bonne part de la matinée.
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Je vois le jeune Ezra sur la balançoire. Il lance ses jambes pour amplifier son vertige. Il rit comme jamais. C’est une illusion. Ezra est reparti avec son amour pur comme un diamant bleu, ses petites autos, ses livres et son sac de jeux.
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Au-dessus de l’Estérel, un nuage solitaire s’accroche à la vie. Il pompe la chaude lumière comme un buvard se gonfle d’encre pâle. Il s’efforcera de tenir jusqu’à ce que le soir lui transfuse un peu de sang avant de céder au noir.
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